L'Orchestre Cercul Jazz, pour qu'il nous rappelle toujours le duo Franklin Boukaka et Ntouta Mamadou.
L'Orchestre Cercul Jazz qui a cessé d'exister depuis 44 ans, a bien été un des grands groupes historiques de la rumba, des musiques envoutantes aux climats étranges réalisés suivant une inspiration très éclectique : Salsa, Biguine, Folk, Jazz...
Au commencement était le Cercle culturel de Bacongo.
1954 - A la faveur de la création à Brazzaville de plusieurs activités culturelles, notamment au sein du célèbre Cercle Culturel de Bacongo, (dirigé par Dominique Nzalakanda, ancien maire et ministre sous l'Abbé Fulbert Youlou) la formation musicale "Armonie Brazza" de Bacongo qui existait depuis 1952, intègre le Cercle Culturel et en devient l'animateur principal, au point où il se fait désormais appeler "Orchestre Cercul Jazz". On compte dans le groupe les musiciens : François Bamanadio (chef d'orchestre - guitare solo), Joseph Ndebeka (guitare rythmique), Honoré Loubayi (saxo), Auguste Mahoungou (clarinette) Alphonse Malanda, Sangou "De la danse", Jean Bakanga... qui créèrent un véritable enthousiasme parmi les milieux musicaux de Brazzaville.
Plus tard en 1959, Miguel Samba, Didi Siscala, Joseph Ndebeka, Dominique Ntoudissa et Michel Miadeka, Ntouta Mamadou, Freddy Nkounkou complètent les effectifs de l'orchestre.
En 1960, le Cercul Jazz traverse le Pool pour séjourner à Kinshasa. Pendant plusieurs mois, l'orchestre fait les beaux jours dans les dancings "Ciné Bar", "Paris soir", et surtout le bar du "Vieux Moudzale".
L'intégration de Franklin Boukaka
En 1962, la première équipe sera relayée par une autre dont les musiciens Franklin Boukaka, Ntounta Mamadou (chant), Pecos (guitare solo) Paul Nzoungou (guitare rythmique), Alphonse Taloulou, Diam, Papa Moziki (basse) Henry Bibi de Massouka (batterie), Siméon Malonga "Rikky" furent les grands architectes de la brillante carrière de cet ensemble dont l'oeuvre aux climats passionnants a représenté une étape importante de la musique congolaise.
La présence de Franklin Boukaka, issu des orchestres, Negro Band et Jazz Africain va être d'une grande opportunité. Grand interprète, ses textes dominent l'ensemble de la production du groupe avec une poésie axée sur l'Afrique, le monde, son décor et ses obsessions. Sa musique rencontre l'écriture et de là est né un climat engagé et dansant.
Entre 1963 - 1964, Cercul Jazz va alors entreprendre une tournée africaine qui le conduit au Gabon, au Tchad, au Cameroun et au Nigéria. Sur le chemin de retour, l'orchestre qui est au sommet de sa gloire, séjourne deux mois à Dolisie via Pointe-Noire avant de rentrer triomphalement à Brazzaville. Il élit domicile, "Le Club Lomeka" (ex-bar Bouzoumou) dans la rue des Martyrs à Poto-poto, et de s'appeler désormais Cercul Jazz "Lomeka". C'est à cette époque que l'orchestre réalise ses plus belles oeuvres phonographiques. Musique à la congolaise, parfaitement mise en place et produite dans les meilleures conditions par les éditions Stenco puis Pathé Marconi.
Franklin Boukaka et Albert Ntouta Mamadou vont s'imposer comme les meilleurs chanteurs du groupe et les leaders incontestés jusqu'en 1967, année au cours de laquelle, Franklin Boukaka crée son propre groupe "Sanza", composé des "sansistes" Albert Mampouya, Pierre Bandinga et du batteur Dominique Otomba.
Seul maître à bord, Albert Ntouta Mamadou conduit avec brio les destinés de l'orchestre Cercul Jazz jusqu'en Novembre 1972 , date à laquelle il décède à Kinshasa pendant le séjour qu'effectuait le groupe dans la capitale congolaise. (neuf mois après la mort de Franklin Boukaka en Février 1972) Il sera inhumé à Brazzaville avec tous les honneurs et en présence des grands musiciens kinois, dont Gérard Madiata qui présente l'oraison funèbre avant de faire un vibrant tour de chant à la mémoire du défunt.
Avec la mort de Ntounta Mamadou, le Cercul Jazz cesse pratiquement d'exercer. En 1975, le chanteur Matingou et le batteur Biniakounou "Tochino" tentent d'exhumer l'orchestre, mais sans succès. Enfin, notons que le Cercul Jazz a réuni tout au long de son histoire des musiciens d'horizons très divers et tenté une synthèse de leurs différents idiomes. On peut citer entre autres musiciens, des noms comme: Pierrot Loukouamoussou, Arthur Samba Nona (saxo) Francis Bitsoumanou (guitare basse) Domsis (tumbas), Matingou (chanteur), Didier Mouanga Rondos, Mabwa... Le résultat était étonnant. Une belle page de l'histoire de la musique congolaise.
Clément Ossinondé