Le déductif et l’inductif
L'une des tables du test Progressive Matrice 38 de Raven, utilisé pour évaluer le raisonnement. (Psychoweb)
Dans un de mes « papers », je me suis permis de parler en passant d’une démarche qui peut être déductive ou inductive, sans m’y attarder. Je croyais que la dichotomie était suffisamment universelle. Ma professeur me dévisage par-dessus ses lunettes et dit : « Qu’est-ce tu entends par là ? ». Je lui dis qu’une présentation est déductive quand elle commence par une généralisation, une règle, une énonciation qui doit aussitôt être expliquée. Par contre, une présentation inductive commence par des exemples ou des choses qu’on observe ou par des pratiques, pour arriver à un principe, une loi, une règle, une idée générale. Tracez un triangle rectangle dont les côtés adjacents de l’angle droit mesurent respectivement 3cm et 5cm. Maintenant tracez un carré du côté qui mesure 3 cm. Calculez la surface de ce carré. Maintenant tracez un carré du côté qui mesure 5cm. Calculez la surface de cet autre carré. Maintenant mesurez la longueur du côté en face de l’angle droit, c'est-à-dire l’hypoténuse. Maintenant tracez le carré de l’hypoténuse. Calculez la surface du carré de l’hypoténuse. Qu’est-ce que vous constatez ?
Ma prof me regarde encore par-dessus les lunettes et dit : « Quand vous arrivez au théorème à partir de tout le procédé, que dites-vous ? N’avez-vous pas « déduit » le théorème ? Comment voulez-vous dire alors que ce procédé est « inductif » et non « déductif », quand ce que vous faites s’appelle « déduire » ? Il fallait bien, lui dis-je, que quelqu’un se débrouille pour donner des noms distinctifs à cette dichotomie. Il fallait trouver un moyen. C’est depuis les fables de la Fontaine qu’on nous a appris que certaines présentations sont déductives. Par exemple, « La raison du plus fort est toujours la meilleure ». Pour nous donner l’exemple qui illustre cet adage, la fable dit aussitôt « Nous l’allons démontrer tout à l’heure » et raconte l’histoire du loup et de l’agneau. Quand la fable touche à sa conclusion, on ne nous donne pas un nouvel adage. C’est tout simplement la fin de l’histoire où « Le loup l’emporte et puis le mange/Sans autre forme de procès ». C’est la méthode déductive.
Par contre, dans Les Animaux Malades de la Peste, on nous raconte l’histoire, puis on conclut « Selon que vous serez puissant ou misérable/Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir ». Voilà la méthode inductive.
La méthode déductive, lui dis-je, est plus commune quand il y a une thèse qu’il faut démonter :
Makambo mibale ebomi mokili mobimba (Il y a deux choses qui troublent le monde à en mourir)
Liboso nde likambo ya falanka (La première, c’est l’argent)
Ya mibale likambo ya basi (La deuxième, c’est la femme)
Baninga botiya matoyi e (Nous l’allons démontrer tout à l’heure)
Si deux jeunes hommes sont très amis jusqu’à en mourir
Une jeune femme peut faire en sorte que leur amitié se brise
Si elle s’interpose entre eux
Quant à l’argent, je crois que vous le savez vous-mêmes
etc, etc.
Quand mbuta Miyalu dit qu’il avait eu douze enfants et qu’il nous dégaine comment chacun des enfants a trouvé la mort, c’est aussi une démarche déductive.
Mais comme les choses du monde ne sont pas toujours en noir et blanc, il y a des chansons où l’on n’est pas très sûr s’il s’agit d’une démarche déductive :
Bolingo oyo nazwa o ya pasi
Ebebisi ngai nzoto o Nzambe a e
Nakokondo pamba na makanisi a e
Likolo ya mobali oyo o nabala a
Soki olingi ngai lisusu te o o
Lobela ngai nalapa Nzambe libela a a
Kasi yakobebisa ngai loposo a e
Wana ngai naboyi papi o o yabaka a
Moi, je vois dans ces quatre distiques (un distique est une strophe de deux vers) une démarche déductive où le premier peut être une généralisation des trois autres distiques, mais j’admets que c’est discutable. Voilà pourquoi, quand je gratte mon cerveau à la recherche des chansons qui peuvent être classées dans la démarche inductive, je ne trouve que des cas-limites. Ce n’est pas facile d’entrevoir la démarche inductive dans Nazali Mwasi :
Je suis allée à la chasse seule avec des hommes
Ce qui m’a fait de la peine : les injustices
Ce qui m’a beaucoup écœurée : les souffrances
Mon piège a même attrapé plein de gibier
etc., etc.
Conclusion :
Tout cela, parce que je suis une femme
Ce n’est facile de voir la démarche inductive de cette chanson, notamment parce qu’elle contient un pont qui parle de la division sociale du travail entre l’homme et la femme (mobali akata elanga e/mwasi pe akomi kolona yango/po bakufa nzala te e) qui offusque un peu la relation entre le particulier et le général : tout ce partage inéquitable est dû au fait que je suis une femme.
Je crois qu’il y a d’autres chansons où le refrain donne l’impression de conclure ce qui est dit dans l’avant-refrain :
Soki mokanda moyei
Nasepelaka kotanga maloba ya bolingo, chouchou
Photo ya elongi na yo
Télévision na motema na ngai
Pongi nazwa wapi
Maloba akotindelaka ngai na bato
Nakendeke koyoka nini chouchou alobi
Refrain:
Ndenge y’olingaka ngai
Nayebi ezali bolingo ya solo o
Nandimeli yo, chouchou
Kitisa motema, chouchou
Rendez-vous pendant les vacances
Ngai na yo se libala
PEDRO