L’orchestre Bana Ndombe et la beauté d’un texte inédit
Dans le cadre d’une espèce de tradition orale moderne, je crois qu’un étudiant d’histoire va un jour se pencher sur tous les orchestres de manzanza qui, dans les années 1970s, égayaient certaines soirées des internats loin du « prince ».
Quand je suis arrivé à l’Institut Ngombe Lutete en septembre 1972, l’orchestre des étudiants à Vula se nommait « The Black Boys ». C’est à cette époque qu’il fut renommé Bana Ndombe. C'est-à-dire, le nom de l’orchestre a été traduit. C’était un véritable orchestre avec trois guitares sèches non électrisées. Vous pouvez comprendre que la guitare basse ne s’entendait presque pas. Les chanteurs n’avaient pas de micro. Et pourtant, l’orchestre était bien « officiel ».
Même Mademoiselle Margaret Amy Stockwell (MAS), directrice de l’école, était invitée aux concerts à une époque où l’on croyait que les chansons profanes étaient un sacrilège pour les missionnaires. Je ne sais plus si l’on accordait « officiellement » beaucoup d’importance à l’orchestre dans le programme extracurriculaire, mais les chansons démontraient bien l’insertion de l’orchestre au programme d’étude.
Voici trois distiques du refrain de la chanson dont le texte me plaît de porter à la connaissance des mbokatiers :
Ebandeli ya likambo nyonso ekosaka bato
Tobandaki malamu ekomi lelo tokabwana
Tristan na Yseult bakabwani oyo somo
Philtre tomelaki ekeyi wapi e, yo Yseult
Ngai nasukolaki yo mibali misusu balula yo
Tala likambo ekosala ngai pasi ooo na motema
Et il y a un quatrième distique dont je ne me souviens plus.
Voici ma traduction :
Le début de toute entreprise est souvent trompeur
Nous avons trop bien commencé pour qu’aujourd’hui on se sépare
Tristan et Iseut se sont séparés ; quelle horreur !
Où est donc passée la magie du philtre que nous avons bu ?
Moi, je t’ai nettoyée ; d’autres hommes t’admirent
Voilà ce qui me fait mal au cœur
Si vous connaissez des paroles d’une chanson d’avant 1972 qui ressemblent à celles-ci, de n’importe quel orchestre ya manzanza d’un quartier quelconque de Kinshasa, c’est que les Bana Ndombe se sont inspirés de celle-là. Si vous connaissez des paroles d’une chanson d’après 1974, 1975, etc., qui ressemblent à celles-ci, il est bien possible que le compositeur ait été à Ngombe Lutete. C’est comme ça que même Stevie Wonder a reconnu devant un tribunal que le refrain « I just called to say I love you » a bel et bien été inspiré par un orchestre ya manzanza à l’échelle américaine.
PEDRO
PLEINS FEUX SUR LES PETITS ORCHESTRES, PAR « JEUNES POUR JEUNES »
VOICI L’ENREGISTREMENT D’UN PETIT ORCHESTRE DÉNOMMÉ T. G. LEMBE-LEMBE DU ZAIRE DE LA ZONE DE KASA-VUBU